1er octobre

Aujourd’hui atteint 51° 2’ de latitude nord, le plus septentrional de mes coups de pédale ! Point de bascule et amorce d’une longue descente jusqu’au delà du 45° parallèle probablement… Je me demande combien de tours de roues ou de pédalier il faut pour franchir une minute de latitude ? Les plus avertis diront que tout dépend du développement utilisé. Et aussi du diamètre des roues… et de la trajectoire plus ou moins orthogonale à l’Equateur… Certes, mais en moyenne ? Problème digne des « Copains » de Jules Romain, aussi entêtant que oiseux !

Ce tournant du voyage étant accompli, il faut dire que j’ai été assez ému par l’arrivée au bout du continent, un sentiment éprouvé physiquement par la traversée des paysages qui depuis les Vosges et le Lorraine s’ouvrent progressivement, écrasés par le ciel de plus en plus immense, de plus en plus lumineux, et caressés par un vent nouveau, plus doux que les bises aigres de l’intérieur des terres… J’ai pensé à ce qu’on dû éprouver, à pied peut-être moins nettement, ou différemment, les barbares, les soldats, les émigrants, les pèlerins, tous ceux qui ont eu à franchir ces mêmes territoires successifs jusqu’à éprouver le dernier d’entre eux, moins extrême que le Finistère, mais qu’on sent quand même bien être à la fois une fin et un début… Autre étonnement, l’entrée brutale dans la très grande métropole lilloise en arrivant de l’Avesnois, quasiment sans transition, à peine annoncée par quelques lotissements en lutte contre les tas de betteraves. Brusquement la circulation devient dense, la végétation s’éloigne de la route qui devient rue, avenue, voie rapide… et le cycliste qui dominait le paysage de la tête et des épaules a soudain du mal à sortir la tête du flot pour trouver sa route ! Très bizarre ! Heureusement le phénomène est réversible et à la sortie de la grande ville le cycliste émerge doucement et s’ébroue sur le macadam qui lui est rendu ! D’autant plus agréablement en la circonstance que je me suis extrait presque furtivement de l agglomération par les bords de la Deule, fréquentés par les canards, les écoliers, les coureurs à pied, quelques cyclistes et autres amoureux plus ou moins furtifs eux aussi…

La mer à Dunkerque, depuis l’Auberge de jeunesse (plus ou moins privatisée mais bon, c’est un autre sujet…)

J’ai déjà la réponse de mon ami Philipp ingénieur émérite à ma question ! « Il faut pas poser ce genre de question aux ingénieurs, ils ne peuvent pas l’ignorer.

  • 80 tpm de cadence et 20 km/h font 240 rotations de pédale/km.
  • 1.85km par minute d’arc, donc seulement environ 430 tours/minute d’arc

A vérifier sur un tronçon EO ou NS à moins de faire un peu de trigonométrie en plus. »

Merci Philipp ! 🙏

Où l’on voit que l’on gagne à cultiver à la fois l’humilité du cycliste et l’athéisme inoxydable du communiste. Hier entre Lille et Dunkerque ma route passait par le Mont des Cats, doté d’un monastère d’un relais hertzien, juchés à 164 m d’altitude. Et bien dans la montée j’ai du mettre pied à terre, avec pourtant 2.000 km et 21.000 m de dénivelée dans les « cuissots » comme dit ma fille cadette ! Cote directe, donc courte mais fort raide, un petit 12% sans doute… Heureusement j’ai pu remonter en selle avant de passer devant la porte des trappistes et ne pas leur accorder la satisfaction d’une génuflexion purement physiologique mais qu’ils auraient pu mal interpréter…

Je retrouve le sujet de « Monopolville » de Francis Godard, un livre qui m’avait beaucoup impressionné sur les liens du capital et de l’Etat…

Arrivée à Calais… accueilli par les concertina…